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hestiia : la transition énergétique en récupérant la chaleur ‘fatale’ (Alexandre Vinot)

La transition énergétique suppose, d’une part, l’élimination des énergies fossiles au profit des énergies renouvelables. D’autre part, elle suppose également d’accroître l’efficacité énergétique des logements. En France, la transition énergétique est portée par des personnalités tel que Jean-Marc Jancovici, ingénieur à l’origine du bilan carbone et du Shift Project. Ce dernier est d’ailleurs l’un des inspirateurs d’Alexandre Vinot, co-fondateur en 2016 de la société hestiia, à Nantes. Cette dernière propose de mettre à profit des sources produisant de la chaleur, qui autrement serait perdue. En l’occurrence, la chaleur fatale qu’Alexandre propose de récupérer provient de cartes électroniques.

L’histoire de la société hestiia est liée à celle de ses deux associés fondateurs, Alexandre Vinot et Camille Chenuil. Comme le rappelle Alexandre, « nous venons tous les deux de familles d’entrepreneurs. Nous nous sommes rencontrés aux Arts & Métiers. C’est durant la troisième année de notre cursus que notre projet d’entrepreneuriat est né ».

Les logements : de véritables passoires énergétiques

Au contact des actualités, en lisant certains livres ou en écoutant des podcasts, Alexandre développe sa conscience écologique. Il est particulièrement sensible aux arguments présentés par Jean-Marc Jancovici. Ingénieur, ce dernier est à l’origine du bilan carbone, du Shift Project et grand annonciateur de la décroissance inexorable des sociétés occidentales. Or, Alexandre constate l’énorme gaspillage d’énergie généré par notre mode de vie. Pourtant, il existe des solutions technologiques permettant de diminuer cette perte d’énergie dite ‘fatale’.

Pour lui, le problème se pose notamment au niveau des habitations, véritables passoires énergétiques. En effet, les fuites y sont omniprésentes (murs, fenêtres, douches, eaux usées). « Par exemple, nous rejetons de l’eau chaude après l’avoir utilisée pendant quelques secondes seulement. Fort de ce constat, Camille et moi-même avons décidé de passer à l’action ».

Entreprendre, sans passer par la case ‘salariat’

Poussés par la volonté de travailler sur un projet qui avait du sens, les deux hommes deviennent entrepreneurs. Tout en conservant l’esprit de famille caractéristique des Arts & Métiers. Comme se souvient Alexandre, « aux Arts & Métiers, tout le monde se respectait ! L’ambiance était hyper sympa ! Quand je travaillais sur des projets avec d’autres camarades, nous cherchions à résoudre des problèmes. Sans avoir à subir les relations hiérarchiques toxiques ni les jeux de politique interne que l’on retrouve malheureusement trop souvent dans les grandes sociétés ». Certes, Alexandre aurait pu se faire embaucher par une grande société de services numériques. Mais il a préféré prendre le chemin de l’entrepreneuriat.

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En effet, le fait de travailler sur le bon projet, avec les bonnes équipes, tout en s’attachant à résoudre un challenge intellectuel, cela seul le motive ! En co-fondant sa propre société dès 2016, Alexandre se donne la possibilité de réaliser ses aspirations.

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myEko (c) hestiia.

Au début : un échangeur de chaleur pour les bacs de douche

Avec Camille, Alexandre commence par travailler sur un échangeur de chaleur adapté aux bacs de douche. Il s’agit d’un dispositif permettant d’économiser 30% d’énergie sur chacune de ses douches. « Le dispositif est assez fin de façon à pouvoir être inséré sous les receveurs de douche. Il récupère les calories des eaux usées avant qu’elles ne soient rejetées dans les égouts. La chaleur est ensuite réintégrée pour chauffer l’eau utilisée lors de la douche ».

Il s’agit d’un dispositif simple, low tech, sans beaucoup d’électronique. Il trouve acquéreur parmi les grands promoteurs immobiliers : Eiffage, Bouygues, etc. Cependant, un certain désenchantement gagne Alexandre et Camille lorsqu’ils constatent que ces promoteurs achètent leur système, surtout pour échapper à leur obligation d’installer des panneaux solaires. Résultat : « nous avons petit à petit perdu notre passion. Nous en sommes venus à penser que seuls les particuliers pouvaient vraiment faire bouger les choses ».

Pour Alexandre, il devient clair que les grandes entreprises agissent en fonction de la demande. En effet, lorsque les consommateurs leur demandent autre chose, elles se retrouvent dans l’obligation de changer. D’elles-mêmes, elles ne sont pas porteuses de changement. « Nous avons alors pris conscience qu’il fallait nous adresser au grand public directement. Or, notre projet d’échangeur de chaleur ne convenait pas à ce type de clientèle, puisque nous ne pouvions aller que sur de la maison neuve ».

SATO, par hestiia : un nouveau projet de récupération d’énergie

Alexandre décide par conséquent de changer son fusil d’épaule, tout en restant focalisé sur le thème de la récupération d’énergie fatale. Pour cela, il a recours à son appétence pour les milieux informatiques ainsi que pour tout ce qui entoure le développement du Bitcoin. « J’ai connu le Bitcoin en 2013, à l’époque où le minage* se pratiquait encore dans les chambres d’étudiants et les maisons de particuliers hobbyistes. Ces individus géraient le réseau, de manière très décentralisée. Moi-même je minais un petit peu. Ce faisant, j’avais constaté que je pouvais me permettre de baisser mon chauffage, en raison de la chaleur dégagée par les cartes électroniques ».

Compte tenu de sa nature décentralisée, il apparaît logique de déployer le minage n’importe où, tout en étant payé pour cela. Pour Alexandre, la chaleur produite par le minage représente un gaspillage. Elle ne sert à rien, n’est utile pour personne, « elle est simplement dégagée dans l’air », ce qui correspond à la définition même de l’énergie ‘fatale’. Or, les personnes dépensent par ailleurs des fortunes pour se chauffer ! Au sein d’hestiia, Alexandre et Camille mettent alors au point SATO pour récupérer la chaleur résultant du minage pour, enfin, lui donner une utilité.

MyEko, radiateur innovant pour accélérer la transition énergétique

Comme Alexandre le rappelle, investir et miner sont deux activités indépendantes. Afin de découpler minage et chauffage vis-à-vis de leurs clients, et pour s’adresser ainsi aux ménages présentant peu d’appétence pour le Bitcoin, hestiia propose un nouveau système de chauffage prenant la forme d’un radiateur électrique intelligent, myEko. Lorsqu’il est branché, myEko allume une carte électronique intégrée ultraperformante “H1” capable de réchauffer une pièce de 10 à 15 m².

Selon Alexandre, « notre nouvelle offre ‘myEko’ est éco-responsable, dès la conception. Nous avons recours à des composants respectueux de l’environnement. myEko est en outre conçu pour éviter toute forme d’obsolescence. Il recycle 100% de l’énergie ‘fatale’ produite par sa carte de calcul en chaleur, ce qui réduit l’impact carbone annuel de l’équivalent de plus d’un tour du monde en avion, pour un foyer de 90 m² en moyenne ». Notre interlocuteur estime le revenu ‘compensatoire’ ainsi généré par myEko à 450€ par an pour un logement de 90 m², avec la possibilité pour l’utilisateur de transférer un tel montant en euros sur son compte bancaire.

myEko représente par conséquent deux avantages par rapport à SATO : d’une part, il s’adapte aussi bien aux maisons individuelles équipées d’un système de chauffage central qu’aux appartements chauffés à l’électricité. D’autre part, il supprime tout lien apparent avec l’activité de minage. L’utilisateur myEko laisse simplement tourner la carte électronique intégrée à son radiateur, sans avoir à se soucier du minage réalisé par ces cartes. Il se contente de collecter le revenu dégagé en même temps que la chaleur ‘fatale’ produite par ces dernières. hestiia s’occupe du reste !

Les perspectives d’expansion d’hestiia

À leurs débuts, Alexandre et Camille bénéficient de nombreuses aides de la part de BPI (emprunts à taux zéro, subventions). En outre, ils sont hébergés au sein d’un incubateur parisien. Une fois la phase d’incubation achevée, leur projet réussit à capter l’attention de fonds privés. Ces derniers prennent même une participation au capital de leur société.

En 2023, Alexandre a l’intention de faire également appel à des fonds d’investissement public. Car il est convaincu de travailler sur un projet allant dans la bonne direction. En effet, le chauffage au gaz paraît désormais compromis, compte tenu des problèmes d’approvisionnement en gaz russe. En revanche, le chauffage électrique semble avoir le vent en poupe. Concernant l’international, il projette d’exporter sa solution assez rapidement. « L’Allemagne, par exemple, offre des perspectives intéressantes ».

Afin d’accompagner ses projets d’expansion, hestiia souhaite passer d’un effectif de 19 à 44 personnes en quelques mois. « Nous recherchons des profils opérationnels (ingénierie, réseaux sociaux, marketing). Tout reste à faire ! Nous avons donc vraiment besoin d’individus prêts à s’investir. Des personnes de terrain, tant en marketing que dans le domaine technique (hardware ou software) ».

hestiia : son co-fondateur Alexandre Vinot est fier d’avoir recruté son directeur des opérations parmi ses clients. Cela montre que les personnes sont prêtes à s’engager sur des projets qui ont du sens. Photo et vidéo : (c) LaTDI.

* Minage : procédé par lequel les transactions en Bitcoin sont sécurisées. À cette fin, les mineurs effectuent avec leur matériel informatique des calculs mathématiques pour le réseau Bitcoin. En récompense, ils collectent les Bitcoins nouvellement créés (source : bitcoin.fr).

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