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Open Agrifood : faire entrer l’éducation alimentaire dans les programmes scolaires

Aujourd’hui, certes, les enfants savent bien que les garçons ne naissent pas dans les choux, ni les filles, dans les roses ! En revanche, ils croient qu’un poisson se présente à l’état naturel sous la forme d’un cube recouvert de panure. Ou qu’une salade pousse dans un sachet en plastique. Afin de mieux faire connaître la façon dont les aliments arrivent dans nos assiettes, tout en éduquant le sens du goût des plus jeunes, l’association Open Agrifood, par la voix de sa directrice Florence Dupraz, se mobilise. Son but : faire inscrire l’éducation alimentaire dans les programmes scolaires ! Pour ce faire, elle n’a pas hésité à faire le buzz au salon de l’agriculture 2023 avec le Rallye Fétasoupe !

Pendant une quinzaine d’années, Florence Dupraz a été professeure des écoles, puis directrice d’école, notamment à Dunkerque, dans le nord de la France. Elle se souvient : « j’ai beaucoup apprécié la basse ville de Dunkerque ainsi que l’école au sein de laquelle j’ai exercé, située en ZEP. J’y ai développé de nombreux projets à l’attention des enfants, même si cela ne concernait pas encore l’alimentation ». Afin de stimuler la curiosité des élèves, Florence monte une classe scientifique dans le cadre d’un partenariat avec les entreprises du territoire. « Dans le cadre du projet ministériel ‘La main à la pâte’, nous avons encouragé les enfants à expérimenter par eux-mêmes. Cela m’a beaucoup inspirée lors de la création du Rallye Fétasoupe en 2022 ».

L’événementiel, mais avec du sens !

Par la suite, Florence quitte Dunkerque pour Lille, où elle travaille au sein du World Forum Lille. C’est là qu’elle découvre l’événementiel, mais avec du sens ! En effet, le World Forum s’intéresse à des problématiques liées à la Responsabilité Sociale des Entreprises. Cela dans le monde entier. Florence fait alors partie de l’équipe de création du World Forum aux côtés de Philippe Vasseur, ancien ministre de l’agriculture de Jacques Chirac.

En arrivant dans la région Centre, elle monte l’association Open Agrifood en compagnie d’Emmanuel Vasseneix et Xavier Beulin en 2013. « Il s’agit d’un forum favorisant le dialogue entre tous les acteurs économiques de la filière alimentaire. Comme vous l’aurez compris, mon action s’inscrit au sein d’enjeux économiques et territoriaux ».

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Lors de l’édition 2022 du Rallye Fétasoupe. (c) Valérie Marini @RACCORD Film.

Open Agrifood et l’importance de la filière alimentaire

Avec Open Agrifood, Florence part d’un constat : « aujourd’hui, plus personne n’a conscience de la lenteur, ni de la difficulté et encore moins du risque que représente le fait d’amener dans nos assiettes tous les produits de l’agriculture. Pourtant, faire pousser une tomate cerise suppose de planter une graine, puis de l’arroser, tout en s’assurant d’une bonne exposition au soleil, etc. »

Pour provoquer une prise de conscience, Florence souhaite inscrire l’éducation à l’alimentation dans les programmes scolaires. Auparavant, un tel apprentissage était naturel. En effet, nous habitions près des fermes et, par ailleurs, nous avions toujours un pied à la campagne. Selon Florence, il convient de réintégrer toutes ces connaissances au sein de notre patrimoine culturel. Nous avons besoin de saisir la valeur de l’alimentation et l’importance que représente le fait de bien se nourrir.

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Réapprendre aux enfants à cuisiner et à bien manger

Pendant le confinement, de nombreux jeunes ont ressenti la faim, car ils ne savaient plus se faire à manger ! Mettre une carotte, une pomme de terre et un navet dans une casserole pour se faire une soupe dépassait leurs capacités ! Face à cette situation, Florence veut remettre les recettes de base au centre des préoccupations. Selon elle, « il s’agit d’une question de survie ! » En outre, se faire à manger permet de se nourrir sainement, en évitant les produits transformés. « Nous enjoignons donc les jeunes à se passer de la junk food tout en retrouvant certains réflexes de survie liés à notre patrimoine culinaire ! »

Ce retour à l’essentiel est d’autant plus nécessaire que les maladies liées à l’obésité et au diabète font désormais des ravages. « La sécurité sociale dépense chaque année 20 milliards d’euros en soins curatifs. Pourquoi ne pas prélever une toute petite partie de cette somme pour la consacrer à des programmes d’éducation alimentaire ? »

Cela implique de former le goût des enfants, amenés à goûter les plats qu’ils cuisinent. « On augmente ainsi leur répertoire de saveurs. Ils se mettent à apprécier des choses différentes. Au contraire, les enfants de Dunkerque n’avaient pas envie de goûter des légumes. Car ils étaient déjà habitués à manger des chips ! »

Comment s’y prendre pour améliorer les habitudes alimentaires ?

Pour inverser cette tendance délétère, Open Agrifood veut instaurer un moment d’éducation à l’alimentation, notamment à l’école primaire. « Cela passerait par le fait d’installer un potager dans chaque école, dans lequel on planterait de petites graines afin de les regarder pousser. On pourrait également mettre en place des cours au sein de la cuisine de la cantine. On peut imaginer que les enfants s’attelleraient à la réalisation de recettes simples, ne serait-ce qu’une fois par quinzaine ou une fois par mois ».

Selon Florence, cela pourrait se faire pendant le temps scolaire ou bien la pause méridienne. Ou bien même pendant les activités périscolaires, entre 16 et 19 heures. Les enseignants pourraient travailler main dans la main avec les entreprises de la restauration collective : Sodexo, Elior, Compass, Restau’Co, etc. « Dans toutes les cantines, nous trouvons des personnes dont le métier consiste à servir à manger aux enfants. Ils connaissent les produits et les recettes et feraient ainsi l’objet d’une montée en compétences, gagnant par la même occasion en reconnaissance ».

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Lors de l’édition 2022 du Rallye Fétasoupe. (c) Open Agrifood.

Open Agrifood : orchestrer la reconquête du patrimoine culinaire

Florence est bien consciente de la nécessité de bien s’entourer pour porter la cause de l’éducation alimentaire. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Open Agrifood compte parmi ses partenaires nombre d’acteurs du monde agricole : les chambres d’agriculture, le ministère de l’agriculture (via la DRAAF), la Coopération Agricole (promotion du modèle de coopérative agricole). Parmi les entreprises, l’association a obtenu le soutien de l’Ania (industries agro-alimentaires), LSDH (entreprise de conditionnement des liquides), ou encore des Crudettes.

La grande distribution n’est pas en reste, avec Lidl ou Carrefour. De même que la restauration collective : Elior, Restau’Co, Compass, etc. Sans oublier Euro-Toques, l’association des chefs de la restauration traditionnelle, dont certains sont étoilés. Florence souligne enfin que de très nombreux citoyens suivent les initiatives d’Open Agrifood. Ils sont abonnés à la newsletter de l’association et soutiennent ses opérations. Open Agrifood a également noué des partenariats avec la recherche (Agro Paris Tech et l’INRAE).

Comme le souligne Florence, « nous voulons faire en sorte que tout cet écosystème soit derrière nous pour nous aider à inscrire l’éducation à l’alimentation dans les programmes scolaires. Avec un certain succès, d’ailleurs. Nous avons édité un manifeste en 2022. Ce dernier a été signé par la quasi-totalité des patrons de la filière alimentaire (interprofessions ou entreprises privées). Au-delà de la défense des intérêts particuliers, cet élan montre que tout le monde est prêt à s’engager pour défendre ce bien commun que représente une bonne alimentation. Car mieux manger nous aide à mieux vivre et à faire société, tous ensemble ».

Rallye Fétasoupe, des ateliers ludiques en plein salon de l’agriculture !

Lors du Rallye Fétasoupe organisé à l’occasion du salon de l’agriculture les 25 et 26 février derniers, Open Agrifood a occupé cinq stands afin d’expliquer, de façon ludique, comment différents aliments étaient plantés (poireaux, carottes, blés, pommes, patates). Quelle est la saison la plus propice ? Comment poussent-ils avant d’être récoltés ? Les jeunes visiteurs ont ainsi pu connaître la raison pour laquelle de petites buttes étaient nécessaires pour cultiver les plants de poireaux ! Ou alors, qu’il existait différentes espèces de blés (barbichu / non-barbichu). Or, « ces sujets, pourtant élémentaires, sont complètement méconnus par les enfants des villes à l’heure actuelle », déplore Florence !

Les enfants ont par la suite eu l’occasion de planter une graine (carotte, poireau), d’éplucher une pomme, de manger une pomme crue en la comparant avec le goût plus sucré d’une compote. Open Agrifood a bien insisté pour que les enfants se souviennent que la nourriture était précieuse.

En outre, ces activités ont été animées par des jeunes des quartiers populaires. Ces derniers sont venus expliquer aux enfants des villes comment cela se passait dans les campagnes. « Ces jeunes, note Florence, nous les avons formés pendant un mois. Nous tenions vraiment à réaliser un pont entre les quartiers populaires, la campagne et la ville. Cela nous est apparu comme un symbole très fort ».

Florence Dupraz (Open Agrifood) nous explique comment l’agriculture a besoin de la contribution de toutes et de tous, y compris celle des jeunes urbains des quartiers populaires ! Photo : (c) Valérie Marini @RACCORD Film. Vidéo : (c) LaTDI.

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