Connaissez-vous le biomimétisme ? Cela consiste à s’inspirer de la nature pour résoudre certains problèmes… Ayant constaté l’impact négatif de l’éclairage artificiel sur la santé, Manon LOUSTAU et Tinou SEGUIN, co-fondateurs de Libu, s’inspirent des variations de la lumière du soleil tout au long de la journée. Nous avons rencontré Manon pour qu’elle nous présente sa solution d’éclairage circadien.
C’est en 2019 que Manon LOUSTAU et Tinou SEGUIN fondent Libu, contraction de light bulb, ampoule en anglais. L’entreprise n’est au départ qu’un simple projet étudiant porté par ces deux élèves-ingénieurs de l’Institut d’Optique, école spécialisée dans l’ingénierie en rapport avec la lumière. “Pendant deux ans, en parallèle de nos études, nous avons développé des prototypes dans le but de valider notre technologie”.
Au tout début, comme ils bénéficient d’un statut d’étudiants-entrepreneurs, les deux associés participent à un certain nombre de concours. Pour deux raisons : premièrement, cela leur apporte une certaine crédibilité. “Lorsqu’on est étudiant et que l’on commence à monter une société, il n’est pas évident de se projeter dans une posture d’entrepreneur”. Deuxièmement, cela leur permet de valider l’intérêt réel du marché vis-à-vis de leur innovation. À la fin de leurs études, les deux jeunes ingénieurs brevettent leur solution d’éclairage circadien.
La solution biomimétique de Libu
En observant les phénomènes naturels, Manon LOUSTAU et Tinou SEGUIN cherchent à s’inspirer de la nature en adoptant une démarche biomimétique. “L’idée s’appuie sur le fait que la lumière est le principal synchroniseur de notre horloge biologique. Elle permet de gérer nos cycles d’activité/repos, veille/sommeil, et par conséquent le fonctionnement d’ensemble de nos organes. L’impact sur la santé est donc assez large, car tout cela est synchronisé par la lumière naturelle du soleil”.
Le problème des lumières artificielles réside dans le fait qu’elles ne tiennent pas compte du rythme naturel de la lumière du soleil. Cela finit par dérégler notre horloge interne, en provoquant des troubles du sommeil, des risques de stress, de fatigue, d’erreurs, sans compter les arrêts maladie plus fréquents l’hiver que l’été. Il s’agit donc d’un véritable enjeu de santé au travail et de santé publique.
L’éclairage circadien, c’est quoi ?
Manon LOUSTAU et Tinou SEGUIN mettent donc au point un luminaire reproduisant les cycles de la lumière du soleil. “Nous avons donc des couleurs plus orangées le matin et le soir, correspondant aux phases du lever, puis du coucher du soleil. Durant le reste de la journée, la lumière diffusée sera plus blanche. En suivant le cycle naturel de la lumière solaire, le luminaire donne à notre corps les bons signaux aux bons moments pour réguler notre horloge biologique”.
Vis-à-vis des travailleurs en horaires décalés, Libu fournit des signaux donnant à ces derniers des repères pour que l’organisme se dise : “Là, maintenant, c’est le début de la journée”, ou alors : “C’est la fin de la journée et je vais bientôt rentrer chez moi”.
Les solutions d’éclairage Libu sont donc fondées sur des sources LED se rapprochant à 97% de la lumière naturelle du soleil. En outre, ces luminaires intègrent les fameux signaux non-visuels permettant de réguler l’horloge biologique. “Dans l’œil, nous avons des capteurs traduisant la vision. D’autres capteurs, tel le ganglion à mélanopsine, vont capter uniquement certaines parties du spectre lumineux pour réguler l’horloge interne”.
Une gamme de produits adaptés aux usages standard
Pour l’heure, Libu propose une gamme en plein développement de produits centrés sur l’éclairage des espaces de travail. “Le premier produit que nous avons sorti et que nous commercialisons le plus aujourd’hui, c’est le pavé LED. Il s’agit d’un produit standard très utilisé et qui s’installe comme un luminaire classique. Il va en outre avoir cette fonctionnalité biomimétique que l’on ne trouve pas dans les autres solutions d’éclairage. Nous partons de formats usuels dans le milieu professionnel, tout en leur intégrant notre technologie”.
Le second type de produits est constitué par un lampadaire d’1,90 mètre. Il est conçu pour être posé au sol et branché sur une prise. Il s’adapte aux lieux dépourvus de faux plafonds, aux lieux hybrides au sein desquels l’aménagement varie souvent. Les personnes qui télétravaillent peuvent aussi l’installer à leur domicile.
Comme le rappelle Manon LOUSTAU, “tout est automatisé. Il n’y a aucune complexité pour le client. Nos luminaires se branchent de façon classique. Nul besoin d’application, car tout est préprogrammé en usine. Chaque luminaire Libu est équipé d’un petit calendrier. Il connaît donc la date et l’heure et calcule le type de lumière le plus adapté pour le corps. Nous nous interfaçons bien entendu avec les protocoles du bâtiment connecté, comme la détection de présence, etc.”
Timeline de l’industrialisation des solutions d’éclairage Libu
C’est en 2018 que Manon LOUSTAU et Tinou SEGUIN valident leur solution par le biais d’une preuve de concept. C’est-à-dire qu’ils mènent une étude avec des chercheurs en chronobiologie et aussi la médecine du travail. Une fois que les entrepreneurs disposent des clés scientifiques prouvant que leur solution fonctionne, ils passent à la vitesse supérieure. Et créent leur société en mai 2019.
Par la suite, ils abordent la phase d’industrialisation, en passant du prototype au produit. “Nous nous sommes mis en quête de partenaires industriels locaux pour nous accompagner sur les différentes parties de notre processus : électronique, mécanique, assemblage, etc. En effet, alors que nous étions en plein Covid, nous nous sommes rendu compte qu’il serait beaucoup plus simple de travailler avec des partenaires situés à proximité. Cela nous permet de régler les problèmes éventuels en nous rendant sur place. C’est beaucoup plus simple comme cela”.
Des partenaires industriels locaux
C’est ainsi que Libu déniche son premier partenaire industriel à Pessac. Au fur et à mesure que leur gamme de produits s’étend, Manon LOUSTAU et Tinou SEGUIN se mettent en quête de nouveaux partenaires, du point de vue mécanique notamment. “Nous avons identifié une entreprise dans le Béarn, au pied des Pyrénées. Car le tissu de la sous-traitance industrielle français, concernant notamment l’électronique, est assez fourni. Même si nous sommes obligés de sourcer certains composants en Asie, faute de solution locale”.
Selon Manon LOUSTAU, la grande difficulté pour une entreprise qui démarre réside dans sa capacité à contractualiser sa première collaboration. Car il faut aussi que le partenaire industriel fasse confiance à la société donneuse d’ordres. “Or, pour une entreprise qui démarre, a fortiori une startup avec un modèle innovant, cela n’est pas évident”.
La stratégie de conquête de nouveaux marchés par Libu
Libu a pour objectif de devenir l’acteur français spécialiste de l’éclairage circadien pour les professionnels dans toutes les situations de travail. “Aujourd’hui, une grande partie de notre activité est orientée vers le tertiaire (horaires standard de personnes travaillant en bureau)”.
Cependant, depuis 2024, l’entreprise se penche plus particulièrement sur la problématique des horaires décalés. Cela concerne aussi bien les personnels de sécurité et de surveillance travaillant sur moniteurs, que ceux du secteur socio-médical (médecins, infirmiers ou aides-soignants), y compris dans les Ehpad.
Enfin, d’autres secteurs représentent des opportunités également intéressantes. “C’est le cas de l’industrie par exemple, même si les grandes hauteurs sous plafond exigent un éclairage un peu différent”. Comme le souligne Manon LOUSTAU, “notre champ d’action est donc très large”.
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Les investisseurs soutiennent Libu
En mars dernier, Libu a réalisé une levée de fonds d’un million d’euros. Comme le reconnaît Manon LOUSTAU, “il nous fallait passer à des projets de bâtiments complets. Nous avions donc besoin de passer un certain gap en termes de volumes, en nous structurant sur le plan industriel pour atteindre nos objectifs de croissance. Là se situait pour nous l’intérêt de cette levée de fonds”.
Pour aligner leur croissance industrielle sur leur croissance commerciale, Manon LOUSTAU et Tinou SEGUIN se sont donc tournés vers des soutiens à la fois privés et publics. Parmi ces derniers, citons 3A Venture, Arts et Métiers Business Angels, Synergence, Adour Business Angels ou encore INSEAD Business Angels. Si bien qu’aujourd’hui, nos deux entrepreneurs sont en passe de réussir leur pari : répondre à une attente forte en matière de santé au travail, tout en faisant fabriquer leurs produits en France !
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Manon LOUSTAU, avec son associé Tinou SEGUIN, est à l’origine de Libu, le spécialiste français de l’éclairage circadien. Cette solution d’éclairage pour les professionnels reproduit le cycle naturel de la lumière du soleil pour donner à l’organisme les bons signaux… au bon moment ! Photo : (c) Libu. Vidéo : (c) LaTDI. Musique : (c) ES_Eternal Fire (Instrumental Version) – Adelyn Paik.
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